Installations en bambou du Parc artistique du bambou de Wugenshan dans le bourg de Daoming, à Chengdu
Dans la ville historique et culturelle de Chengdu, la culture traditionnelle s’harmonise avec la vie moderne. De jeunes filles vêtues de la jupe mamian (une jupe traditionnelle chinoise) déambulent dans les rues, des spectacles de l’opéra du Sichuan sont présentés autour de fondues chinoises... Ces dernières années, le guochao, ou le chic chinois, a gagné en popularité.
Le patrimoine culturel immatériel, qui fait partie intégrante du guochao, est très apprécié par de nombreux jeunes. Ils sont passionnés par l’apprentissage et la préservation de l’artisanat traditionnel, tout en valorisant l’innovation, dans le but d’insuffler une nouvelle vitalité à la culture traditionnelle.
L’artisanat de nouvelle génération
L’artisanat traditionnel est la manifestation du patrimoine culturel immatériel. Il y a une crainte qu’il ne soit progressivement oublié avec le temps. Heureusement, de nombreux jeunes ont choisi de perpétuer ces savoir-faire ancestraux.
Wang Xiaolu, issue de la génération « post-80s », a repris le flambeau de sa mère, héritière du patrimoine culturel immatériel national du filigrane d’argent de Chengdu, un art qui a une histoire de plus de 1 700 ans. « L’amour et le dévouement de ma mère pour cet art m’ont beaucoup influencée », confie Wang Xiaolu. Elle a étudié la conception et la production d’objets artisanaux touristiques à l’université, et a tenté de concevoir des boucles d’oreilles en filigrane d’argent dans un style audacieux et personnalisé. Ses maîtres n’appréciaient pas son style et pensaient que personne ne s’intéresserait à ces boucles d’oreilles. Cependant, lors d’une exposition, sa mère a exposé ces bijoux qui ont rencontré un vif succès auprès des jeunes. « Chaque jour, ma mère a pu vendre quelques paires de mes créations, jusqu’à épuisement des stocks », se souvient Wang Xiaolu. C’était la première fois qu’elle ressentait un sentiment d’accomplissement dans la production des objets en filigrane d’argent, ce qui lui a également permis de réaliser que cet artisanat traditionnel devait évoluer avec la mode et répondre au goût des jeunes.
Après avoir obtenu son diplôme, Wang Xiaolu a rejoint l’atelier de filigrane d’argent de sa mère. Pour elle, cet élément du patrimoine culturel immatériel est un artisanat à la fois beau et romantique, où chaque objet, façonné à la main, porte l’émotion et la pensée de l’artisan. « Regardez le motif du filigrane d’argent, c’est vraiment élégant et magnifique », avoue Wang Xiaolu.
Zhang Dingjuan, de la génération Z, est entrée par hasard dans le tressage de bambou. Ses souvenirs de cet artisanat remontent à son enfance, lorsque ses grands-pères fabriquaient des paniers ou corbeilles en bambou pour l’usage quotidien. À ses yeux, les produits réalisés par ses grands-pères étaient uniques, toujours ornés de motifs fantastiques. « Je pense que mes grands-pères aimaient cet artisanat, et ne cherchaient pas seulement à gagner de l’argent », déclare Zhang Dingjuan.
Après avoir terminé ses études universitaires, Zhang Dingjuan a choisi un emploi dans la conception d’objets tressés en bambou. En 2020, pour des raisons professionnelles, elle s’est rendue à Daoming (Sichuan), un lieu célèbre en Chine pour le tressage de bambou. Là-bas, elle a découvert par hasard les œuvres artisanales de Zhao Sijin, un héritier représentatif de ce savoir-faire classé au patrimoine culturel immatériel national. « J’ai été éblouie par la beauté des objets en bambou. Ils étaient plus délicats que sur les photos d’Internet. J’ai trouvé ce que je cherchais », fait savoir Zhang Dingjuan. Par conséquent, elle a commencé à apprendre le tressage de bambou auprès de Zhao Sijin pendant les week-ends et s’est entraînée avec assiduité. Pour continuer à perfectionner son savoir-faire, elle a démissionné et s’est installée à Daoming.
L’apprentissage de cet art s’est révélé plus ardu que ce qu’elle avait imaginé. Non seulement elle devait maîtriser le traitement du matériau, mais devait aussi s’exercer sans relâche aux différentes techniques de tressage. Peu à peu, elle a démontré son talent dans ce domaine et a été reconnue comme un « génie » par Zhao Sijin.
À Chengdu, de nombreux jeunes, à l’instar de Wang Xiaolu et Zhang Dingjuan, se sont lancés dans le domaine du patrimoine culturel immatériel. Tant que les jeunes continueront à pratiquer ces artisanats traditionnels avec passion, ceux-ci conserveront leur vitalité et leur dynamisme.
Processus de remplissage dans le façonnage du filigrane d’argent
Un coup de génie
Qu’apportent les jeunes artisans au patrimoine culturel immatériel ? Wang Xiaolu, par exemple, se concentre sur l’intégration de l’artisanat traditionnel et du design moderne, dans l’espoir que ses créations en filigrane d’argent répondent aux tendances actuelles et s’intègrent à la vie quotidienne des jeunes.
« Si le filigrane d’argent n’existe que dans le musée, il deviendra certainement un art perdu », affirme Wang Xiaolu. Elle s’attache à étudier les goûts des jeunes et à créer des bijoux élégants à prix abordable, afin que le filigrane d’argent soit apprécié par ces derniers. Faites à la main, ses créations sont uniques. Elles se vendent aussi bien en ligne qu’en boutique. « Comme la création d’objets artisanaux prend du temps, nous avons une équipe pour réaliser les objets », précise Wang Xiaolu.
Elle est ravie de voir ses clients se fidéliser. « C’est une bonne tendance. Tant qu’il y a de la demande, le savoir-faire ancestral peut continuer à être transmis. » Selon elle, au fur et à mesure du développement scientifique et technologique, la mécanisation accélère la production, dans ce contexte, l’artisanat prend une valeur encore plus grande.
L’artisane essaie de combiner la technique du filigrane d’argent à celle de la broderie et de la céramique. Les objets qu’elle a créés utilisent des matériaux et des couleurs variés, ce qui les rend plus intéressants et attrayants. Elle a également incorporé des éléments traditionnels chinois tels que le lion éveillé, la grue au sommet vermillon, le panda géant et le zodiaque chinois dans ses motifs. « J’espère que les arts traditionnels pourront mieux s’adapter à l’esthétique moderne », explique-t-elle.
Wang Xiaolu reconnaît qu’il existe un écart générationnel entre elle et sa mère en matière de conception et de concept esthétique, mais elles s’encouragent et respectent les idées de chacune. Elles aspirent à bien préserver cet artisanat traditionnel pour lui permettre d’évoluer et de s’intégrer à la vie quotidienne.
Au cours de son apprentissage du tressage de bambou, Zhang Dingjuan a souvent réfléchi à l’intégration de cette technique à la vie quotidienne. À l’aide de ses compétences en design et en peinture, elle a tenté de colorer le bambou et a tissé des objets colorés. « Le tressage de bambou traditionnel est beau, mais pas adapté à notre époque. Pour mieux se répandre, les objets en bambou doivent être modernisés », explique Zhang Dingjuan. En ce moment, ses créations telles que des éventails colorés, des sacs et des coques de téléphone sont très appréciées sur l’application Xiaohongshu.
Zhang Dingjuan perfectionne sans cesse son savoir-faire pour permettre à davantage de personnes d’apprécier la beauté moderne du tressage de bambou. Elle comprend que ce chemin n’est pas facile, mais elle est déterminée.
Processus de polissage dans le façonnage du filigrane d’argent
Une tendance en plein essor
De nos jours, un nombre croissant de jeunes chinois se passionnent pour la culture traditionnelle chinoise. Ye Zixiang, un jeune des années 1990, est un fervent collectionneur de sculptures sur bois et de peintures traditionnelles. Son studio abrite une variété de ces sculptures. Il a étudié les beaux-arts populaires avec son directeur de recherche, et ils visitaient souvent le marché des antiquités. Au fil des jours, il s’est intéressé aux sculptures sur bois et a eu envie d’en apprendre davantage sur la technique et la culture de cet art.
En les collectionnant, Ye Zixiang a appris tout seul à les restaurer. Il a partagé ses expériences sur les réseaux sociaux et a trouvé de nombreux amateurs partageant ses goûts.
De nos jours, les jeunes chinois accueillent non seulement le développement scientifique et technologique, mais aiment aussi la culture traditionnelle chinoise. Ils peuvent découvrir la beauté du patrimoine culturel immatériel et sont prêts à innover dans les artisanats traditionnels. Grâce à leur créativité, le patrimoine culturel immatériel peut s’intégrer à la mode et être transmis de génération en génération.
*ZHANG MAN est journaliste à Chengdu Culture.