Pourquoi l’ambition de la Chine en matière de neutralité carbone est-elle importante ?

RCI 2021-11-08 14:54:04
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La Future Intelligence Valley, une importante section du Parc Wenyuhe de Beijing, est le premier parc à thème « neutralité carbone » de la ville. Photo prise le 1er octobre 2021.

La Future Intelligence Valley, une importante section du Parc Wenyuhe de Beijing, est le premier parc à thème « neutralité carbone » de la ville. Photo prise le 1er octobre 2021.

La Chine a annoncé ses objectifs pour atteindre son pic d’émissions de dioxyde de carbone avant 2030 et la neutralité carbone d’ici 2060. Quelle est l’importance des efforts de réduction des émissions de la Chine, le pays le plus peuplé, pour elle-même et pour le monde ? Comment la Chine agira-t-elle pour atteindre ses objectifs ? Le Dr Zhang Junjie, professeur associé dans le programme d’environnement de l’Université Duke Kunshan, donne son point de vue sur ce problème mondial.

Pourquoi la Chine prône-t-elle la neutralité carbone ?

Dr Zhang Junjie : La Chine a annoncé l’ambitieux objectif de neutralité carbone d’ici 2060 en raison de sa responsabilité internationale mais aussi de ses besoins intrinsèques. Elle fait partie de la communauté internationale, donc le leadership de la Chine est extrêmement important pour le succès de l’objectif climatique mondial. Intrinsèquement, la réduction des émissions de carbone est alignée sur les intérêts de la Chine en matière de réduction de la pollution atmosphérique, de transformation de sa structure industrielle, de transformation de son secteur énergétique et d’amélioration de son efficacité énergétique. C’était donc le bon moment pour la Chine d’annoncer son objectif de neutralité climatique.

La Chine travaille dur pour atteindre la neutralité carbone. Quelle importance ces efforts revêtent-ils pour le changement climatique mondial ?

Dr Zhang Junjie : La Chine a annoncé son objectif de neutralité carbone pendant la pandémie de COVID-19, cette décision était donc très inhabituelle. C’est un engagement unilatéral, parce que cette décision n’a été prise sous la pression d’aucun pays, y compris développé, et que l’annonce a été faite unilatéralement sans engagement significatif des États-Unis ni de l’UE. Et la déclaration de la Chine a contribué à inciter d’autres pays à suivre ses pas. Par exemple, le Japon et la République de Corée ont annoncé leurs objectifs de neutralité carbone après la Chine, et l’administration Biden, une fois au pouvoir, a également communiqué son objectif de neutralité carbone. Ainsi, la Chine a renforcé la confiance mondiale dans la lutte contre le changement climatique.

La Chine a proposé d’atteindre son pic de carbone avant 2030 et la neutralité carbone d’ici 2060. Ces objectifs sont-ils faciles pour la Chine ?

Dr Zhang Junjie : C’est très difficile en raison de l’équilibre entre croissance économique et décarbonisation. D’ici la fin de cette décennie, vers 2030, la Chine est sur le point d’émettre 12 milliards de tonnes de gaz à effet de serre ou équivalent dioxyde de carbone. Cela ne laisse à la Chine que 30 ans pour atteindre le zéro émission nette et cela signifie qu’elle devra réduire ses émissions d’environ 400 millions de tonnes de dioxyde de carbone par an. Cela ne s’est jamais produit dans l’histoire de l’humanité, et d’autant plus pour un pays qui a encore besoin d’une croissance économique importante. La Chine devra éliminer les émissions d’un pays européen de taille moyenne. Je pense que la Chine réalisera deux miracles en même temps, le premier est le miracle de la croissance économique, le second est celui de la décarbonisation. C’est un défi que nous n’avons jamais connu et nous sommes très impatients de le relever.

Pour atteindre cet objectif, quels types de mesures la Chine mettra-t-elle en œuvre ?

Dr Zhang Junjie : En termes de mesures politiques, toutes les politiques, en particulier celle climatique, sont liées à l’attribution d’un prix au carbone. Il peut donc y avoir un prix explicite ou un prix implicite. La tarification explicite du carbone est devenue un instrument basé sur le marché permettant à la Chine d’atteindre son objectif d’émissions tout en minimisant son impact économique. Mais aussi, il existe de nombreuses autres politiques implicites de tarification du carbone, en particulier pour les projets pilotes de normes d’émissions et pour le plaidoyer en faveur d’un mode de vie sobre en carbone.

Outre sa politique climatique, la Chine a de nombreuses autres politiques climatiques complémentaires. Toutes ces politiques sectorielles liées aux économies d’énergie et à la transformation énergétique contribueront à l’objectif climatique de la Chine.

Quels types d’industries ou d’entreprises seront fortement impactés par le processus de neutralité carbone ?

Dr Zhang Junjie : Nous avons beaucoup discuté du coût de l’atténuation du changement climatique, en particulier pour le système national d’échange de quotas d’émissions de carbone. À l’origine, il couvre le secteur de la production d’électricité, mais il sera étendu à sept autres secteurs : les matériaux de construction, la pétrochimie, la chimie, le papier, l’acier, les métaux non ferreux et l’aviation civile. Ces secteurs seront donc sous forte pression pour réduire leurs émissions. Mais nous devons également examiner cela, alors que la Chine continue de développer son économie. Substituer des secteurs à faibles émissions de carbone aux secteurs polluants crée de nombreuses opportunités commerciales. J’ai donc tendance à me concentrer davantage sur les nouvelles opportunités qui seront créées par la transition bas carbone de la Chine.

Cela aura-t-il une influence sur le mode de vie de gens ordinaires ?

Dr Zhang Junjie : Tout le monde sera concerné. Si vous regardez les États-Unis, environ 20 % des émissions directes sont liées aux ménages. Et si l’on compte les émissions indirectes, en réalité, 80 % des émissions sont liées aux ménages. Cela signifie que la réduction des émissions ne relève pas seulement de la responsabilité des entreprises, des générateurs électriques et des secteurs manufacturiers, mais aussi de notre mode de vie au quotidien. Il faut donc changer ce mode de vie : voyagez moins, recourez à la téléconférence, utilisez l’énergie verte, prenez les transports en commun. Si vous devez conduire, prenez une voiture à énergies nouvelles. Utilisez des ampoules et des appareils économes en énergie. Ces habitudes nous aideront à réduire notre consommation d’énergie ou à utiliser davantage d’énergie verte.

*JIANG WEIHUAN est correspondant spécial pour China Focus.


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