De petits gestes pour retrouver la biodiversité en ville

RCI 2021-06-01 15:34:33
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Il faut laisser les herbes pêle-mêle, à l’état naturel, afin d’aider à préserver la biodiversité

Il faut laisser les herbes pêle-mêle, à l’état naturel, afin d’aider à préserver la biodiversité en ville

Est-il possible de nos jours de veiller à la biodiversité, de favoriser la végétation et la présence des animaux dans les formats actuels des villes à forte densité avec des gratte-ciel et autres immeubles en béton armé ? Oui, c’est toujours possible. Mais cela nécessite un peu d’imagination qui devra conduire à de petits gestes capables de faire la différence.

Dans une interview accordée à China media group (CMG), Lyu Zhi吕植, professeure en conservation biologique à l’Université de Beijing (Beida en chinois), également fondatrice du Centre de conservation de la nature Shan Shui (山水自然保护中心 Shan Shui Conservation Center), a cité l’exemple de l’Université de Beijing, dont le campus faisait autrefois partie des jardins impériaux sous la dynastie des Qing.

Avec une superficie de 1 k㎡, le campus de Beida accueille chaque jour environs 50 000 personnes. Des chiffres qui font de ce campus un endroit avec une très forte densité de la population. D’après Lyu Zhi, grâce au concept de jardin établi lors du design de l’école, les constructeurs ont cueilli plus de 30 000 graines et plantes locales de Beijing au cours de la construction de cette université qui a aujourd’hui plus de 100 ans.

Bien que petit, depuis 2013, le campus a attiré quelque 300 animaux, selon les données recueillies par l’équipe de Lyu Zhi. Oiseaux, insectes, mammifères (dont hérisson), amphibiens et autres espèces, tous coexistent dans le campus de l’Université de Beijing. Les étudiants ont notamment recensé plus de 220 espèces d’oiseaux qui vivent dans une surface de 1 k㎡.

Fervente défenseure de la biodiversité dans les espaces verts, Lyu Zhi, en associant les enseignants et élèves de Beida, a appelé depuis l’an 2000 à ne pas aménager les verdures en pelouses uniformes. Selon l’écologiste, il faut les laisser pêle-mêle à l’état naturel, afin d’aider à préserver la biodiversité et à offrir des espaces à l’existence des insectes. « Les insectes sont les aliments des oiseaux, les plantes offrent des aliments et habitats aux oiseaux. Ce qui crée un réseau alimentaire : la végétation, les insectes, les espèces nourris par plantes, et ceux nourris par animaux, une couche liée à une autre, voilà un réseau établit au sein d’un petit campus », présente Lyu Zhi.

A l’heure actuelle, selon Lyu Zhi, il est temps de transformer les vieilles idées dans la gestion urbaine. L’écologiste préconise l’interdiction du pesticide dans les espaces verts urbains, afin de rétablir la biodiversité en ville. « Les pesticides sont de plus en plus puissants et capables de tuer tous les insectes, y compris ceux qui sont utiles pour l’homme. Les secteurs en gestion urbaine insistent toujours sur l’usage du pesticide pour ne pas voir les insectes en ville ; néanmoins, les insectes constituent les aliments des oiseaux ! Malgré leur apparence un peu effrayante, la plupart des insectes sont sans danger pour l’homme. »

De plus, Lyu Zhi fait savoir aussi d’autres moyens pour préserver la biodiversité en ville. Par exemple, laisser une partie des feuilles mortes, au lieu de toutes les balayer, parce que, dit-elle, les éléments décomposés des feuilles permettent d’améliorer la qualité du sol ; planter des arbres indigènes, parce que les espèces indigènes sont plus compatibles à l’environnement local, tandis que les espèces extérieurs s’accommodent difficilement à l’environnement local.

La pelouse uniforme n'est pas propice à former un réseau alimentaire en faveur de la biodiversité(Crédit: RCI)

La pelouse uniforme n'est pas propice à former un réseau alimentaire en faveur de la biodiversité

Par ailleurs, ces dernières années, la Chine a fait des progrès en matière de traitement des rivières polluées, « l’importance réside dans la réduction de l’émission des eaux polluées en amont », affirme Lyu Zhi.

Selon elle, toute la planète fait face actuellement au problème de durcissement de la rivière, c’est-à-dire qu’on façonne le lit fluvial avec du ciment, ce qui coupe les échanges naturels entre les eaux, la végétation et le sol sur le quai et affecte la santé du fleuve. « Nous souhaitons que le lit naturel soit autant que possible bien gardé dans le cadre des travaux d’aménagement écologique. A part les parties construites pour la prévention des crues, il faudrait démolir la partie dure du lit fluvial », souligne Lyu Zhi.

D’après elle, il est possible de redonner au fleuve son état limpide. En Europe, plusieurs exemples de l’aménagement des rivières polluées prouvent que cela est possible, mais le rétablissement de l’écosystème au sein d’une rivière devait se faire à long terme. « Cela nécessite des moyens financiers et le changement de mentalité. En urbanisme et en planification industrielle, on aurait besoin de prendre en compte l’écologie, l’interactivité entre l’homme et la nature ainsi que la liaison entre des industries et la nature. Il nous reste un long chemin à parcourir à cet égard », reconnaît Mme Lyu.

Apparue en tout début 2020, la COVID-19 s’est propagée dans tous les coins du monde, rendant difficile la vie en société. Mais cette pandémie s’est finalement révélée comme une occasion de réfléchir sur les relations entre l’homme et la nature. « L’homme envahit davantage d’habitats des animaux sauvages et brise de fait la distance avec les animaux sauvages. Cela expose l’homme à des virus d’origine animale, après un long et complexe processus de transmission et d’évolution », indique la professeure.

« Il se peut qu’on n’arrive pas à découvrir à court terme l’origine et la piste de transmission de la pandémie, mais si l’homme continue à traiter la nature de manière inappropriée, on risque davantage de contracter des maladies zoonotiques. L’essentiel est de bien protéger l’habitat des animaux qui assume la biodiversité et que l’homme n’en fasse pas abusivement usage et ne contacte pas les animaux sauvages à sa guise », martèle Lyu Zhi.

En 2007, Lyu Zhi a créé le Centre de conservation de nature Shan Shui, en vue de sensibiliser le public à la protection des espèces et à la conservation de la biodiversité. « Nous organisons des activités pour que les citadins puissent prendre part au rétablissement de la biodiversité en ville. En observant la nature qui nous entoure, j’espère qu’on prête plus d’attention aux plantes et aux animaux autour de nous. »

« Beaucoup ne savent pas que Beijing est un endroit à forte biodiversité : plus de 500 espèces d’oiseaux y vivent, ce qui le classe en première position des capitales du monde. Beijing se situe justement sur l’itinéraire international des oiseaux migrateurs. Au printemps et en automne, plusieurs oiseaux passent par Beijing », révèle Lyu Zhi.

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