Commentaire : Les politiciens américains de plus en plus marginalisés par leurs alliés traditionnels
Entre les Etats-Unis et leurs alliés européens, l’ambiance n’est pas bonne. Pour preuve, la France et l’Allemagne ont quitté il y a deux jours les pourparlers du G7 sur la réforme de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), frustrés par la volonté des Etats-Unis de diriger les négociations, alors que ces derniers ne font plus officiellement partie de cette agence onusienne. Selon des responsables occidentaux, les revendications du côté américain sur la réforme sont trop « dures », voire « irréfléchies ».
Il est bon de rappeler qu’en juillet dernier, le gouvernement américain avait déjà officialisé auprès du secrétaire général des Nations Unies, leur retrait de l’OMS à partir du 6 juillet 2021. Une décision brutale, digne d’un ultimatum. Tout d’un coup, cette superpuissance mondiale, visiblement déterminée à quitter les organisations internationales, refait surface et tient mordicus à guider la réforme de l’OMS. Sans oublier que les Etats-Unis n’ont pas été tendres vis-à-vis de l’OMS, l’accusant d’avoir mal géré l’épidémie du COVID-19. Les Etats-Unis ont ainsi imputé leur gestion chaotique de l’épidémie à l’OMS.
En réalité, sous la direction des Etats-Unis, le G7 a déjà mené en privé 20 rounds de négociations téléphoniques. Si le couple franco-allemand a abandonné les efforts des quatre mois précédents, cela doit être attribué au projet de réforme proposé par les politiciens américains, qui a enfin irrité leurs alliés européens.
Les pays européens voient clairement la réelle intention des Etats-Unis qui semblent avoir hâte de réformer l’OMS. Alors qu’on s’approche de la présidentielle américaine prévue le 3 novembre prochain, les signaux ne sont pas bons. Le nombre de contaminations au COVID-19 a franchi la barre de 5 millions, une situation qui met mal à l’aise les politiciens américains. A cela s’ajoute la pire récession économique et des crises sociales. Tout ceci joue négativement sur la cote de popularité des politiciens américains, actuellement en chute libre.
Il n’y a pas longtemps, l’agence de presse Reuters a souligné dans ses colonnes que la pression constante de la Maison Blanche exercée sur l'OMS ne consistait qu’à détourner les critiques de l’opinion publique sur le gouvernement américain dont on reproche la mauvaise gestion du COVID-19.
Les différences entre les Etats-Unis et l'Europe autour de la réforme de l'OMS montrent que ces deux parties n’émettent plus sur la même longueur d’onde en termes de valeur et d'action face aux grandes crises mondiales.
Pour les grands pays européens, la seule solution aux défis mondiaux, à l’instar de l'épidémie, c’est l’adhésion au multilatéralisme. Même si l'Allemagne, la France et d'autres pays sont parfois en désaccord avec l’OMS en ce qui concerne leurs réponses à l’épidémie, ce groupe de pays ne sont pas pour autant restés bras croisés. Ils sont résolument engagés dans la recherche des solutions à la crise. Ce que les Etats-Unis n’ont malheureusement pas su faire.
De nombreux politiciens et intellectuels européens ont souligné qu'au moment de la propagation rapide de l'épidémie, l'OMS ne devrait pas être affaiblie. Bien au contraire, elle devrait bénéficier de soutien de tous ses membres. Il est nécessaire de veiller à ce que l'agence reçoive davantage de financements et de soutiens, afin qu’elle puisse se focaliser sur la coordination des politiques, la recherche et le développement de vaccins, ainsi que sur l’assistance aux pays en voie de développement. C’est à partir de cette idée, et pendant que les Etats-Unis menaçaient de quitter l'OMS, que l'UE avait appelé à la collecte de fonds en faveur de la lutte contre le COVID-19. Appel largement suivi et soutenu à l’échelle mondiale.
Pourquoi dans les affaires internationales, les grands pays européens comme la France et l’Allemagne s’éloignent des Etats-Unis ? C’est parce qu’ils ont le sentiment de ne pas être respectés par les Etats-Unis. Leurs intérêts ont ainsi été plusieurs fois foulés aux pieds. Les Etats-Unis ont menacé de sanctionner le projet européen de l'énergie «Nord Stream 2». Un cas qui n’est pas isolé, car ils travaillent déjà sur le retrait de leurs troupes stationnées en Allemagne et appellent également les pays européens à former une alliance contre la Chine. Agacée, l’Europe ne veut supporter les caprices des Etats-Unis dans leur stratégie de renforcer leur hégémonie.
C’est pour cette raison que la chancelière allemande Angel Merkel a décliné, en premier, l’invitation de Donald Trump de se rendre aux Etats-Unis pour un sommet du G7. Le site Internet européen «Modern Diplomacy» a récemment souligné dans l'article «UE-Etats-Unis: Nouvelle disharmonie géopolitique» que les différences et les problèmes entre les Etats-Unis et les pays de l'UE avaient compliqué l'alliance entre les deux parties.
Ces dernières années, les politiciens de Washington troublent le monde par leur comportement déchaîné. Le monde, y compris leurs alliés occidentaux, s’indigne contre eux. S’ils continuent d’agir à l’encontre de la moralité, de la conscience et des intérêts communs de la communauté internationale, davantage de gens leur fermeront la porte.