Commentaire: Pourquoi la France et l’Allemagne ont quitté les pourparlers sur la réforme de l’OMS

2020-08-11 21:11:19
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Les pourparlers sur les réformes au sein de l’Organisation mondiale de la Santé se sont arrêtés en queue de poisson. La France et l’Allemagne ont claqué la porte. Ces deux grands pays de l’Union européenne n’ont pas toléré la présence des Etats-Unis dans ces assises, eux qui ne font plus officiellement partie de l’OMS depuis l’annonce par le président Trump de les retirer de cette agence onusienne, a rapporté Reuters. Ce qui a encore suscité l’ire du couple franco-allemand, c’est le fait que les Etats-Unis voulaient même prendre la direction des négociations.

Force est de constater que l’Europe, victime de multiples trahisons de la part de son allié de l’autre côté de l’Atlantique, veut avoir des coudées franches. En tout cas l’Europe n’a plus l’air de se laisser entrainer par les Etats-Unis. C’est une page de l’histoire qui est en train de tourner.

On s’aperçoit que les Etats-Unis ont, ces dernières années, joué sur le protectionnisme et l’unilatéralisme juste pour préserver leurs propres intérêts. C’est le cas des questions sur le changement climatique et l'accord nucléaire iranien, les dossiers dans lesquels les Etats-Unis ont tourné le dos à leurs alliés européens. Pas seulement sur ces deux dossiers, les Etats-Unis se sont également retirés de plusieurs autres organisations internationales et traités internationaux. Un rétropédalage qui n’a pas arrangé les affaires de l’Europe, fervent défenseur du multilatéralisme.

On se rappelle que ce volte-face américain a été beaucoup motivé par la fameuse « l'Amérique d'abord», une politique mise en place depuis l’arrivée au pouvoir de l’actuelle administration américaine. C’est pourquoi, ils n’ont pas hésité à entrer en guerre commerciale contre l'Europe, faisant obstacle à la construction du projet européen de l'énergie «Nord Stream 2». A cela s’ajoute le retrait de leurs troupes stationnées en Allemagne. Officiellement, la hiérarchie américaine justifie le retour à la maison de ses soldats par le poids financier que coûte leur présence en Allemagne. Comme il faut le constater, cette succession de comportements peu conciliateurs des Etats-Unis, porte un coup dur aux relations transatlantiques.

Alors qu’on attendait voir les Etats-Unis jouer un rôle de premier plan lorsque la pandémie de COVID-19 a pris le monde entier de court, la désolation était plutôt grande. Cette première puissance mondiale non seulement qu’elle a brillé par son absence, mais elle aussi affiché des comportements qui ont rendu difficile la lutte internationale contre le COVID-19.

Sur place aux Etats-Unis, la gestion de cette épidémie a été chaotique avec l’explosion de nombre de malades. Et pour cacher leurs faiblesses, les dirigeants américains se sont mis à chercher des boucs émissaires partout. L’OMS et la Chine ont été leurs premières cibles. Un comportement indigne d’un pays qui se dit gendarme du monde.

Alors que le nombre total de personnes contaminées aux Etats-Unis avait atteint 5 millions, Reuters s’est livré à un exercice simple sur le calcul de la moyenne des personnes testées positives au COVID-19. Au finish, cette agence de presse anglaise a constaté qu’un Américain sur 66 était diagnostiqué positif. Pendant ce temps-là, le nombre de décès avait franchi la barre de 160 000, soit 22,4% du total de décès dans le monde, alors que la population américaine elle-même ne représente qu'environ 4% de la population mondiale.

Les pays européens sont depuis longtemps les alliés les plus fidèles des Etats-Unis en ce qui concerne la gestion des affaires mondiales notamment le libre-échange commercial. Que ce soit pendant la Seconde Guerre mondiale ou la guerre froide, les pays européens, particulièrement ceux de l’ouest, ont été aux côtés des Etats-Unis. Cependant, depuis l'arrivée au pouvoir de l’administration Trump, les Etats-Unis dansent sur le pas de l'égoïsme et de l'unilatéralisme. Cette politique est appliquée tant sur le plan interne qu’externe, cela au mépris des revendications de l’Europe qui appelle à cor et à cri à la promotion de l'ordre international fondé sur des règles et à un multilatéralisme efficace. D’où vient l’impossibilité de remédier aux différences entre l'Europe et les Etats-Unis.

Historiquement, le multilatéralisme auquel l'Europe a adhéré remonte aux Traités de paix de Westphalie du XVIe siècle. En tant qu'organisation d'intégration régionale la plus réussie après la guerre, l'UE elle-même est un mécanisme de coopération multilatérale, et sa réputation internationale et son influence géopolitique reposent sur des règles, des dialogues et des consultations efficaces. Aujourd'hui, incitées par l'unilatéralisme et le protectionnisme promus par les Etats-Unis, des tendances de pensée extrêmes telles que le populisme et l'antimondialisation commencent à refaire surface et continuent de s'intensifier. Ce qui constitue une menace grave à la survie et au développement de l'Union européenne.

En juillet dernier, à la Bibliothèque présidentielle et au Musée Richard Nixon, le sécrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a prononcé un discours autour du thème « La Chine communiste et l’avenir du monde libre », dans lequel il n'a pas épargné la Chine de tout ce qu’elle fait à l’interne et sur le plan international. Il a même appelé à former une alliance de démocratie pour répondre à la « guerre entre le monde libre et la tyrannie ». Face à ce « billet de nouvelle guerre froide », le site Internet allemand de la politique étrangère a récemment publié un article disant que depuis plus de trois ans, le secrétaire d’Etat d'un pays qui a méprisé le système multilatéral appelle désormais à la mise en place d'une "large alliance anti-Chine". « C'est vraiment ironique », a dit l’article.

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