Commentaire: Demander une compensation auprès de Chine pour le COVID-19 ? Voici ce que pense un politicien anglais

CGTNF 2020-04-09 22:20:09
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Note de l'éditeur : Adriel Kasonta est un analyste et commentateur des affaires étrangères basé à Londres. Il est le fondateur d'AK Consultancy et ancien président du Comité des affaires internationales de Bow Group, le plus ancien groupe conservateur de réflexion du Royaume-Uni. L'article reflète les opinions de l'auteur et pas nécessairement les vues de CGTN.

Bien que les poissons d'avril ont bien eu lieu cette année mercredi dernier, je ne pouvais honnêtement pas en croire mes propres yeux après m'être réveillé lundi et avoir regardé le fil des actualités sur mon téléphone portable. Le message suivant était apparu : "La vérité est que la Chine est responsable du COVID-19, et si des actions en justice étaient intentées contre Beijing, elles pourraient s'élever à des billions de livres."

Pensant d'abord que cela devait être une blague, car il provenait du tabloïd britannique The Sun, j'ai décidé d'entrer le lien et de plonger dans son contenu dans une recherche plus détaillée sur ce titre dérangeant et ridicule.

Ce que j'ai découvert c'est qu'un groupe de réflexion, bien connu de la politique étrangère britannique sur la persuasion néoconservatrice, a publié un rapport dans lequel ses auteurs affirment que "la prise en charge précoce de la maladie par le gouvernement chinois et le fait de ne pas communiquer correctement des informations à l'OMS ont enfreint les articles 6 et 7 du Règlement sanitaire international (RSI), un traité dont la Chine est signataire et légalement tenue de le respecter."

En outre, ils préparent des demandes de réparations, du type de celles qui sont déposées en contexte de guerre, cherchant à extorquer à Beijing un montant de 351 milliards de livres Sterling (soit 449 milliards de dollars américains). Une somme susceptible de couvrir la totalité des frais engendrés par le plan de sauvetage financier proposé par le Chancelier Rishi Sunak, ainsi que l'augmentation des dépenses du service national de santé visant à gérer la crise provoquée par le Covid-19.

Afin de récupérer cette "modeste" somme, qui ne concerne que les dépenses engagées au 5 avril 2020 (nul ne sait combien de temps durera la crise), les auteurs de la recherche proposent de considérer "dix pistes d'actions en justice qui pourraient potentiellement être engagées à l'encontre de la Chine auprès des institutions juridiques locales et internationales." Parmi elles, "la Cour de Justice internationale, la Cour permanente d'arbitrage, les tribunaux de HongKong, les systèmes de règlements des différends dans le cadre des traités bilatéraux d'investissements, ainsi que des actions possibles auprès de l'Organisation mondiale du commerce."

Ce qui est typique de tels scénarios lorsqu'ils se déroulent dans le champ politique du Royaume-Uni, c'est que les allégations juridiques sont rarement émises par des avocats indépendants. Elles le sont, le plus souvent, par des groupes d'intérêts qui sont généreusement financés et pourvus de plateformes leur permettant (ou permettant à leur riches donateurs) de diffuser leurs préférences politiques à l'encontre des groupes, des pays ou des personnes qu'ils n'apprécient pas, lesquelles se répandent alors rapidement dans les médias de masse britanniques de manière à effrayer le public, en s'en prenant délibérément à leur cible, et/ou simplement de manière à générer de gros profits sur leur crédulité.

"La vérité est que la Chine est responsable du Covid-19" -cette accusation n'est fondée sur aucune investigation ni aucun test -n'est rien d'autre qu'une diffamation politique.

Chose inquiétante, cette diffamation a révélé les mauvaises intentions de hauts responsables du Parti conservateur tels que Michael Gove, qui est actuellement ministre d'État au cabinet du gouvernement de Boris Johnson, et l'ancien ministre Iain Duncan Smith, qui s'emploie à argumenter: "Clairement, brutalement, la Chine semble violer le code de conduite normal dans tous les domaines, des soins médicaux au commerce, de la manipulation des devises à l'oppression intérieure."

Il convient également de noter que M. Smith, en tant que principal critique de la décision du gouvernement d'autoriser Huawei à construire des éléments du réseau 5G du Royaume-Uni, est allé si loin dans son dédain (ce qui, personnellement, me rend malade en tant que fils de juive) qu'il a comparé l'Empire du Milieu à l'Allemagne nazie.

A ce stade, la question à se poser devrait être : "A qui cela profite-t-il?"

En tant qu'ancien président de la commission des affaires internationales du plus ancien groupe de réflexion conservateur du Royaume-Uni, Bow Group, étanttoujours attachéà la retenue, à la diplomatie et au pragmatisme dans mes recherches et dans toutes les décisions que j'ai prises, il est de mon devoir, nonseulement envers l'éthique de la politique étrangère de ce pays, mais égalementenvers le Royaume-Uni, (étant le fils d'un citoyen tanzanien, dont la famille a toujours été liée à la Couronne et au bien-être du Commonwealth), de comprendre pourquoi la Henry Jackson Society a publié cerapport hostile.

Afin de répondre à cette question troublante, il est bon de s'intéresser à cette institution, avant de progresser vers d'autres conclusions.

Cette société a été fondée le 11 mars 2005 par des universitaires et des étudiants de l'Université de Cambridge, dont Brendan Simms, Alan Mendoza, Gideon Mailer, James Rogers et Matthew Jamison – ce dernier étant un élément essentiel de l'enquête.

M. Jamison, ancien membre fondateur, nous donne une description détaillée de la position du groupe de réflexion sur la Chine dans son article publié dans "Strategic Culture" le 7 février 2019 intitulé "La société Henry Jackson et la Chine", où nous pouvons lire ce qui suit : "La Henry Jackson Society organise depuis un certain temps des événements à la Chambre des communes et publie des documents politiquespropageant le sectarisme anti-chinois le plus grossier, le plus primitif et le plus stupide." Il accuse l'institution non seulement d'être "corrompueet raciste", mais aussi de propager "une xénophobie extrême, l'ignorance et la foutaise intellectuelle" au Parlement britannique.

Selon l'ex-Jacksonian, "la Henry Jackson Society est dépourvue de spécialistes de la Chine et de l'Asie et n'a aucune expérience et expertise dans le domaine de la Chine et de l'Asie en général", et nous rappelle également que la Société a été dénoncée pour avoir été payée par le gouvernement japonais pour mener une campagne de diffamation contre la Chine dans le passé.

Sachant tout cela, et en gardant à l'esprit que la Grande-Bretagne post-Brexit a désespérément besoin d'avoir une politique étrangère pragmatique et souveraine après avoir quitté l'UE, j'ose dire que la Henry Jackson Society agit au détriment de l'État britannique et sa relation avec l'une des plus grandes puissances du monde.

Ma grande préoccupation est que les politiciens perfides qui font écho aux préjugés des pays étrangers, que ce soit le Japon ou les États-Unis, vont non seulement à l'encontre des décisions de notre Premier ministre en l'attaquant en personne, mais risquent également d'entacher le statut de ce grand pays et de la nation dans l'arène mondiale.

En abandonnant l'Europe et la Chine, nous ne serons plus qu'un état vassal de l'Amérique anti-chinoise et du président Donald Trump.

(Photos : Xinhua)

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