Commentaire : La dégradation de la situation au Moyen-Orient ne profitera à personne

Au Moyen-Orient, la tension reste vive après la mort du général iranien Qassem Suleimani, tué dans une frappe américaine. Pour l’heure, les hypothèses de la forme que prendraient les représailles iraniennes se multiplient. Pendant ce temps, l’Iran n’a pas tardé à réagir. Le Corps des Gardiens de la révolution islamique d’Iran a lancé, au petit matin du 8 janvier, « une douzaine de missiles » contre des bases américaines en Irak, prétendant avoir causé la mort des « 80 personnes ». Suite à l’interdiction américaine de voler dans l’espace aérien du golfe Persique, un avion de ligne ukrainien de la compagnie UIA Airlines s’est écrasé à Téhéran.

Personne ne sait jusqu’où mènera cet engrenage de tension. Toutefois, il est probable qu'un acte aventureux ou une erreur d'évaluation de la situation pourraient mener les Etats-Unis et l’Iran dans le cercle vicieux de vengeance, et pourraient amener aux affrontements qui embrasseraient le Moyen-Orient. Une situation qui ne profitera à aucune partie.

La sagesse voudrait pour l’heure que l’Iran ne se précipite pas dans de vives représailles. En 2019, le président iranien Hassan Rouhani avait publiquement reconnu que son pays éprouvait de graves difficultés économiques, jamais connues depuis 40 ans, et cela, en raison des sanctions imposées par les Etats-Unis. Actuellement, le gouvernement est préoccupé par la dépréciation de sa monnaie et la flambée des prix sur le marché. Dans ce contexte, des ripostes militaires à grande échelle pourraient, c’est vrai, apaiser à court terme la colère iranienne, mais à long terme, c’est le développement de son pays qui en ressentirait le coup.

Il ne faut pas oublier qu’il y a de cela trente ans, la guerre Iran-Irak avait fait plus d’un million de morts et de blessés, il a fallu beaucoup de temps pour panser les blessures de la guerre. Par rapport à d’autres pays, l'Iran est mieux placé pour savoir que la guerre est la pire des options à ne pas prendre.

Les Etats-Unis, quant à eux, ont été isolés à l’échelle internationale, après l’attaque ciblée contre Suleimani. Des pays occidentaux, comme la Grande-Bretagne, la France et l'Allemagne, ont publiquement condamné l'abus de force des Etats-Unis. L’opposition se fait entendre plus intensivement à l’intérieur du pays. Après l’annonce par le Département américain de la Défense sur le renforcement de la présence militaire au Moyen-Orient, 70 villes ont tout de suite organisé de grands rassemblements anti-guerre. Par ailleurs, si la situation dégénère au Moyen-Orient, les Etats-Unis endosseront seuls les conséquences qui en découleront. Il est parfois bon de rappeler que la guerre d’Irak, déclenchée par les Etats-Unis, a coûté la vie de plus de 4.000 Américains. A l’approche de la prochaine présidentielle américaine et tenant compte de lassitude de la société américaine face à la guerre, il y a fort à parier que les Etats-Unis s’enliseraient dans cette guerre contre l’Iran, une puissance militaire au Moyen-Orient.

L'escalade des tensions entre les Etats-Unis et l'Iran inquiète également le monde. De nombreux pays ont évacué ou réduit leurs effectifs diplomatiques basés dans certains pays du Moyen-Orient et ont émis des avertissements aux touristes. Le marché financier international a été gravement secoué, les prix du pétrole brut et de l'or ont grimpé en flèche. A noter que la quatrième guerre au Moyen-Orient dans les années 1970 a provoqué une crise pétrolière qui a directement conduit à la stagnation des économies des pays développés. De ce fait, la paix et la stabilité au Moyen-Orient sont vitales pour le monde entier.

A l’heure actuelle, l’Iran a affirmé qu’il avait terminé des mesures d’autodéfense et qu’il ne cherchait pas la guerre. La retenue est pour le moment nécessaire pour les Etats-Unis, afin de revenir sur la voie du dialogue et de calmer les tensions au Moyen-Orient.