Focus&Insights: Exactions des Etats-Unis, ennuis infinis de l’Europe

RCI 2020-01-08 18:11:16
Share
Share this with Close
Messenger Messenger Pinterest LinkedIn WeChat

En ce début d’année 2020, trois missiles ont amorcé le baril de la poudre au Moyen-Orient.

Le 3 janvier, un drone américain a mené une frappe aérienne surprise, près de l’aéroport international de Bagdad, en Iraq, contre un convoi iranien, causant la mort de plusieurs dirigeants militaires iraniens et irakiens, dont le général Qassem Soleimani, commandant de la force d'élite Al-Qods du Corps des Gardiens de la Révolution Islamique (CGRI) d'Iran, et Abu Mahdi al-Mohandes, vice-commandant des unités de Mobilisation populaire irakiennes (PMF).

Cette action militaire a choqué le monde: dans ce sens que les frappes ciblées qui ont conduit à la mort du général iranien ont eu lieu sur le sol d’un autre pays souverain. Même les scénaristes hollywoodiens n’oseraient pas imaginer une telle scène dramatique aussi choquante. Encore plus surprenant: dans cette opération, les Etats-Unis n’ont averti qu’Israël, leurs alliés européens étaient complètement ignorants de ce qui allait se passer. Selon le journal anglais The Mirror, le Premier ministre britannique Boris Johnson, qui était en congé en ce moment, s’est montré très choqué par rapport aux frappes américaines. Pour Thomas Tugendhat, parlementaire britannique du Parti conservateur, qui est également président de la Commission des Affaires étrangères du parlement britannique, la définition d’«allié», c’est de prendre l’ennemie au dépourvu, mais pas ses alliés.

Ceux qui suivent de la politique internationale, ont compris que le Moyen-Orient était devenu le baril de poudre depuis la fin de la 2ème Guerre mondiale. Sous l’intervention des grandes puissances extérieures, notamment les Etats-Unis, les conflits étatiques, ethniques et religieux s’entremêlent depuis toujours dans la région du Moyen-Orient, provoquant la propagation interminable du feu de guerre dans la région et l’explosion du nombre de réfugiés dont la plupart sont jetés sur les routes. Pour des raisons historiques, des pays européens, comme la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne ont des intérêts importants dans le Moyen-Orient. Dans cette partie du monde, les questions liées à des réfugiés, au nucléaire iranien, à la Syrie, à l’Etat islamique, sont autant des problèmes que ces pays européens espèrent résoudre sans tarder. Les frappes américaines ont fait l’effet d’une bombe sur ces ennuis des pays européens.

D’abord, cette frappe d’élimination ciblée a soufflé sur les braises des relations américano-iraniennes, et a causé la suspension complète de l'accord international sur le nucléaire iranien. Le gouvernement iranien a annoncé le 5 janvier que son pays renonçait à la dernière restriction clé contenue dans cet accord nucléaire, à savoir "la limitation du nombre de centrifugeuses". D’après l’agence de presse AFP, le président français Emmanuel Macron, le Premier ministre britannique Boris Johnson et la chancelière allemande Angela Merkel ont publié une déclaration conjointe suite à la frappe aérienne américaine, appelant l’Iran à ne pas prendre des mesures susceptibles de provoquer davantage de violences et de la prolifération nucléaire, et à retirer toutes ses mesures qui ne se conforment pas à l'accord international sur le nucléaire iranien. L’Union européenne (UE) a pour sa part publié une déclaration le 5 janvier, invitant le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif à discuter de la situation au Moyen-Orient et du problème nucléaire iranien au siège de l’UE à Bruxelles.

Deuxièmement, des actions éventuelles de vengeance militaire menées par l’Iran et les forces armées chiites mettent le personnel de l’OTAN en Iraq en énorme danger. D’un côté, l’UE tente de sauver l’accord international sur le nucléaire iranien, mais n’arrive pas à empêcher les Etats-Unis à prendre des actions unilatérales économiques et militaires contre l’Iran. De l’autre côté, l’UE espère garder ses relations d’alliés avec les Etats-Unis, mais ne souhaite pas défendre publiquement les frappes surprises américaines qui pourraient mettre les armées européennes stationnées au Moyen-Orient en insécurité. Toujours selon l’AFP, l’Allemagne a annoncé le retrait d’une partie de son armée en Irak le 7 janvier. La Grande-Bretagne a pour sa part évacué presque tous ses diplomates en Irak, sauf son ambassadeur.

Troisièmement, des conflits armés éventuels entre l’Iran et les Etats-Unis coûteront chers aux intérêts des pays européens dans la région. Suite à cet incident, les marchés boursiers ont subi une agitation importante, tandis que les prix du pétrole et de l’or se sont envolés. Et au secrétaire général de l'ONU, António Guterres d’avertir: “le monde ne peut se permettre une nouvelle guerre du Golfe". Une fois qu’éclateraient les conflits armés, l’exportation du pétrole via le détroit d’Hormuz deviendrait difficile, des réfugiés de Moyen-Orient mettraient à nouveau l’Europe à l’épreuve, la résurrection de l’Etat Islamique augmenterait davantage les soucis de l’Europe déjà nombreux.

Partager

Articles les plus lus