Lutte contre la COVID-19 : autant de pays que de méthodes

Laurène Beaumond RCI 2020-11-04 17:02:59
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Soyons francs : qui aurait un jour pensé qu'au 21ème siècle une pandémie mondiale arriverait et bouleverserait à ce point nos modes de vie? Qu'il faudrait rester enfermé chez soi pendant des semaines, ne plus faire un pas dans la rue sans un masque de chirurgien sur le nez, toujours maintenir une distance physique avec autrui? Que des pans entiers de l'économie s'effondreraient? Qu'on ne pourrait plus voyager à l'étranger? Que des couvre-feux (terme qui renvoie inévitablement à la dernière Guerre Mondiale) seraient instaurés dans certaines villes ? Que l'on nagerait perpétuellement dans un climat anxiogène avec une peur du lendemain ne permettant plus vraiment de faire des projets d'avenir, tant sur le plan professionnel que sur celui des loisirs ou de la famille ? Ce scénario semble tout droit sorti d'un film de science-fiction, et pourtant il s'est bel et bien déroulé et il est toujours en phase de to be continued à cause d'un virus nommé Covid-19.

Le coronavirus a tué plus d'un million de personnes (1 154 532 exactement), mais il n'a pas la virulence de la peste noire ou du choléra. On n'en est pas encore à ramasser les cadavres à la pelle et à les entasser dans des charrettes comme au Moyen Age, et les rats n'ont pas envahi les centres-villes. En réalité, et c'est bien la seule chose à peu près certaine concernant ce virus, c'est qu'il n'est fatal qu'aux personnes dites « à risque » : les personnes âgées, celles en surpoids et celles atteintes de maladies chroniques présentant une forte comorbidité, comme le diabète. Le problème de la Covid-19 n'est donc pas tant sa virulence que sa facilité et sa rapidité de contagion. La mystérieuse maladie, encore très mal connue – ce qui la rend toujours dangereuse - a pris le monde par surprise, et la situation est devenue parfois hors de contrôle dans certaines parties du globe, notamment aux Etats-Unis et en Europe. Tant qu'aucun remède n'existe ni aucun vaccin, rien ne risque de s'améliorer dans ces régions ou une partie de la population ne mesure toujours pas bien la gravité de la situation malgré les mises en garde répétées des agences sanitaires et des conseils des ordres de médecins et de scientifiques.

En matière de prévention et de protection de la population, il y a quasiment autant de méthodes que de pays, ce qui a inévitablement conduit à un sentiment de confusion et de peur. L'exemple de la France est particulièrement frappant. Le 13 mars 2020, alors que le virus commence sérieusement à faire parler de lui dans l'Hexagone, le Premier ministre d'alors, Edouard Philippe, affirme avec aplomb que «le masque ne sert à rien ». Il a d'ailleurs dû s'expliquer de ces malheureuses paroles au mois d'octobre devant la justice... Mais comment ne pas lui donner le bénéfice du doute, puisqu'à l'époque, le conseil scientifique ne savait strictement rien de la maladie, et donc ne recommandait pas explicitement le port du masque. Ce n'est que bien plus tard, après le déconfinement du mois de mai, que le masque est devenu indispensable et, à ce jour, le seul accessoire vraiment utile dans l'empêchement de la propagation de la Covid-19. Et aujourd'hui, la confusion règne encore au sujet du masque. Dans certains départements français, il y a les communes qui l'imposent et celles qui ne le font pas, ou alors dans certains quartiers ou rues seulement, ce qui n'a aucun sens. Ajoutons à cela les mouvements anti-masques qui se multiplient en Europe et aux Etats-Unis pour rajouter de l'angoisse à l'angoisse, et vous obtenez un grand n'importe quoi généralisé.

Ce qui marche chez les uns ne marche pas forcément chez les autres. Y a-t-il d'ailleurs un pays ou la gestion de la pandémie par les gouvernements n'est pas critiquée, soit par la population, soit par des opposants politiques qui voient là une occasion en or de repêcher des électeurs potentiels ? Aucun. Certaines personnes refusent de renoncer à leur liberté individuelle avec des arguments plus ou moins valables comme « j'étouffe sous mon masque, on ne peut pas respirer avec ce truc » (on se demande donc comment fait le personnel hospitalier qui en porte pendant 10 heures d'affilée) ou encore « encore une mesure pour nous empêcher de vivre et prendre l'apéro avec nos amis ». Mais de quoi parle-t-on ? De protéger autrui, son prochain, d'une maladie qui pourrait potentiellement les tuer et non pas de renoncer à vivre ! Tout cela est temporaire, et beaucoup trop de gens l'oublient. Les fameux mouvements anti-masques qui rassemblent des milliers de participants en Allemagne ou aux Etats-Unis -pays le plus touché par la Covid, rappelons-le -ont de quoi faire peur. D'étranges théories du complot planent sur ces manifestations qui mêlent le refus de l'autorité de l'Etat et contestation politique. Interviewée par des reporters du journal de TF1, une dame d'un certain âge, médecin dans l'état américain dans le Dakota du Sud, déclare face caméra : « Je refuse de soigner des gens qui portent le masque. Quand je vois un patient masqué arriver, je lui dis de partir immédiatement. » Mais que peut-on attendre de gens qui pensent que l'humanité descend d'Adam et Eve et que le couple cohabitait avec les dinosaures ? C'est sans commentaire. D'autres, au contraire, réclament davantage de fermeté. Récemment, l'Irlande et le Pays de Galles ont choisi de reconfiner leur population pour plusieurs semaines. L'Australie s'est carrément coupée du monde pour endiguer la propagation de la maladie. Des mesures éprouvantes pour des habitants déjà usés par les restrictions quotidiennes, mais qui semblent être acceptées avec une certaine résignation. Ont-elles le choix ?

Certaines nations s'en tirent plutôt bien - souvent celles qui ont pris le problème à bras-le-corps dès le début en mobilisant l'ensemble de ses forces sanitaires, comme la Chine et la Corée du Sud. Là, le nombre de cas est limité et chaque nouveau cluster immédiatement circonscrit. A Wuhan, par exemple, la vie a retrouvé un cours quasi normal. Et il y a les pays où le nombre de cas explose avec l'arrivée d'une deuxième vague qui a déjà déferlé sur l'Europe. Le virus est pourtant le même partout, mais il n'est pas combattu de la même façon selon les pays. Mais peut-on malgré tout parler de pays « bons élèves » , affichant un bilan maîtrisé, et des pays « mauvais élèves ? » Y a-t-il aussi les bons et les mauvais citoyens, les sages contre les rebelles ? C'est sans doute un plus compliqué que cela. La crainte de voir l'économie s'effondrer à nouveau en confinant les populations a conduit certains gouvernements à choisir le risque plutôt que la protection et la santé... et cela se comprend, car davantage de pauvreté et de chômage achèverait probablement le moral des troupes.

L'Organisation Mondiale de la Santé est claire sur les manières de lutter efficacement contre le virus depuis le mois d'avril. Parmi les mesures ayant fait leur preuve - et la Chine peut en témoigner : le port du masque dans les espaces publics, l'isolement des malades, la limitation des contacts physiques et des grands rassemblements, le lavage régulier des mains et la multiplication des tests de dépistage. Ces instructions sont contraignantes mais simples. Si elles sont appliquées scrupuleusement, elles fonctionnent. Et si le confinement des populations a été un épisode traumatisant, cette méthode s'est révélée payante dans tous les pays où elle a été appliquée, même si elle ne demeure pas une option viable à long terme.

La Covid-19 est un fléau qui a eu et aura des conséquences dramatiques pour l'ensemble de la population, et nul ne peut prédire l'avenir. Seule la découverte d'un vaccin permettra de voir la fin du tunnel. Comme toute maladie, elle est injuste, puisqu'elle frappe surtout les plus pauvres qui n'ont pas toujours les moyens de se soigner, et ceux dont la santé est la plus fragile. En attendant le remède, la responsabilité individuelle de chacun d'entre nous s'impose pour freiner la transmission du virus. Il faut se protéger et protéger autrui pour vaincre la maladie. Prenons notre mal en patience. On y arrivera !

Commentatrice : Laurène Beaumond

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