La fabrication de Dizi,  à la main
  2011-07-29 09:55:20  cri

Le Dizi est un instrument de musique chinois. C'est une sorte de flûte traversière. Comme vous le constatez, cet instrument de musique qui a du timbre, parvient à produire un son beau et éclatant, très expressif.

Il est en plus capable de reproduire toute sorte de sons de la nature et de nous emmener dans un monde virtuel, où l'on entend chanter des oiseaux et des ruisseaux.

Selon leur tonalité, le Dizi se range en deux catégories : le Bangdi 梆笛 la flûte Bang du Nord et le Qudi 曲笛la flûte Qu du Sud. Le Bangdi est utilisé pour accompagner le Banzi, une sorte d'opéra originaire du Nord. Le Bangdi est de petite taille, mais la musique qu'il produit est éclatante et dynamique.

Quant au Qudi, il est utilisé pour accompagner l'opéra de Kunqu, ou encore d'autres opéras originaires du sud du pays. Comme il est né à Suzhou du Jiangsu, il est aussi intitulé « Su Di », la flûte de Suzhou. Par rapport au Bangdi, le Qudi est plus gros et plus long. Et la musique qu'il produit est plus douce, plus mélodieuse, imprégnée du charme du Sud du Yangtsé.

Zhou Linsheng周林生 est un grand maître artisan du Dizi. Il est à présent conseiller d'une usine d'instruments de musique chinois, basée à Shanghai. On l'écoute s'exprimer au micro de RCI :  « Il existe une grande différence entre le Qudi du Sud et le Bangdi du Nord. Le Bangdi est plus court que le Qudi. Le Bangdi est doté d'un son retentissant. Quant au Qudi, il est plus doux plus mélodieux. Le Qudi est fait pour accompagner l'opéra de Kunqu, réputé pour sa douceur. »

Toujours selon Zhou Linsheng, les opéras de Bangzi originaires du Hebei ou du Shanxi sont chantés de manière éclatante et retentissante, car souvent joués à l'extérieur, dans les champs. Le Bandi est fait pour les accompagner, il doit avoir lui aussi un son éclatant. C'est une différence à la fois géographique et culturelle entre le nord et le sud.

Zhou Linsheng a souligné qu'actuellement, les deux courants, celui du nord et celui du sud ont tendance à se joindre. Quant à lui, il est prêt à travailler pour la musique, il a fait de la musique son unique objectif, insiste-il.

Enfant, Zhou Linsheng apprenait à confectionner la flûte Dizi auprès de son père. En 1964, il a même fait son apprentissage dans une fabrique de Dizi. Au terme de ses études, il fut embauché par l'école normale où il faisait ses études. Malgré tout, il n'a pas abandonné sa passion de la flûte Dizi.

Chaque hiver, il se rend à Hangzhou dans le Zhejiang, dans le village Tong Ling Qiao铜灵桥, du canton Zhong Tai 中泰, pour couper des Ku Zhu, bambous amers, matériaux bruts nécessaire à la fabrication de Dizi. On écoute s'exprimer au micro de RCI Zhou Linsheng :  « Le bambou se trouve un peu partout dans le bassin du Yangtsé. Toutefois, le Kuzhu du village de Tong Ling Qiao est le meilleur du pays pour faire des Dizi. Si l'on l'appelle Kuzhu, bambou amer, parce qu'il a un goût amer, et qu'il ne peut pas servir d'aliment. C'est ainsi qu'à partir de 1987, l'entreprise fabriquant des instruments de musique chinois de Shanghai a entrepris de coopérer avec le village pour coproduire des Dizi. »

Au village de Tong Ling Qiao du canton de Zhong Tai, Zhou Lingsheng a fait la connaissance de locaux, des gens simples. Il leur a appris sans aucune réserve la technique de fabrication du Dizi. Petit à petit, le canton de Zhong Tai s'est fait un nom dans les environs pour la qualité et la quantité de Dizi qu'il produit. Il est à présent considéré comme le « plus grand producteur de Dizi ». Pour preuve, 80% des Dizi qu'on vend au monde sont issus du village Tong Ling Qiao du canton Zhong Tai.

Selon Ding Zhigang, directeur de l'usine Jiang Yun江韵, fabriquant des Dizi, les bambous amers, qui poussent dans son village sont idéaux comme matériel de base pour la fabrication de Dizi, de par leur forme et leur nature. On l'écoute tout de suite :  « Les bambous amers qui poussent chez nous, au village Tong Ling Qiao font preuve de qualités à part par rapport au reste des matériaux. Sous le règne des Ming et des Qing, ce fut avec les Kuzhu de notre village qu'on fabriquait les Dizi offert à la cour impériale. »

Toujours selon Ding Zhigang, les Kuzhu苦竹 produits par son village sont de bonne qualité, car de grosseur homogène et de longueur convenable. Il y a surtout une longueur suffisamment longue entre deux nœuds de bambou, les rendant faciles à travailler et à transformer en flûte traversière.

Il existe 2 sortes de Kuzhu : le Mi Mu Zhu 密木竹et le Qing Ku Zhu 清苦竹. Le premier est encore plus approprié pour faire des Dizi car incomparable en terme de densité, de dureté et d'homogénéité. Pour promouvoir leurs produits au niveau national voire international, on a mis en avant leur authenticité : les Dizi sont produits ici et à la main. Continuons à entendre Ding Zhigang, directeur de l'usine Jiang Yun : « En général, il nous faut le travail de 7 voire 8 personnes pour faire un Dizi. De la sélection des matériaux à la finition d'un Dizi, il faut passer par 40 à 50 procédés qui sont tous effectués manuellement. La coordination est la clé de la production car liée directement à la qualité d'un Dizi. »

Selon Ding Zhigang, le timbre et l'intonation sont deux facteurs qui décident la qualité d'un Dizi. Le classement d'un Dizi ne se fait qu'après être percé de trous et joué.

Tout à fait. Si l'on constate qu'il dispose d'un jeu fin et d'un beau timbre, on le décorera pour en faire un Dizi haut de gamme. S'il ne peut répondre que l'une des deux conditions requises, il sera destiné au grand public. En général, les instruments hauts de gammes occupent moins de 5% de la production.

Le Dizi brut obtenu en fin de chaîne de fabrication doit encore faire l'objet de finitions. Il doit être laqué et gravé pour être beau sur scène. Les pellicules qui sont collées sur les trous d'un Dizi servent à ajuster le timbre. Ces pellicules sont tirées de roseaux coupés en mai de chaque année.

Un Dizi de bonne qualité doit être associé à de belles pellicules. Ce n'est qu'ainsi qu'il pourra mettre en valeur son timbre. Car, si la pellicule est trop épaisse, elle donnera un son sourd et si elle est trop légère, ce n'est pas bon non plus.

Il est à noter que le Dizi qu'on utilise pour se produire en public est souvent décoré : un nœud chinois fait de fils en soie y est souvent accroché. Un Dizi de luxe est encore plus recherché, avec souvent deux bouts d'os des pattes d'un boeuf, le rendant davantage attractif sur scène. Si un Dizi est fabriqué par un grand maître artisan, il sera signé.

La technique de fabrication de Dizi remonte à très loin dans le temps. Plus de huit millénaires ! Selon Zhou Linsheng, grand maître artisan, il est impossible d'industrialiser la fabrication du Dizi. Plus on cherche à obtenir un Dizi avec un beau timbre, plus il est nécessaire de le produire à la main. Ses 50 ans de carrière lui ont permis de prendre part à l'évolution des procédés de fabrication des Dizi. On écoute une dernière fois Zhou Linsheng : « La technique de fabrication de Dizi a beaucoup évolué. Jadis, la production de Dizi était profondément ancrée dans la culture traditionnelle chinoise. Alors, l'accent n'était pas mis sur l'intonation, mais sur la géomancie, au Yin et au Yang. »

C'est pourquoi sur les Dizi, on remarque que sont souvent attachés 24 fils représentant les 24 périodes de l'année. Les Dizi sont divisés en Yin et Yang ou mâle et femelle, d'après leur longueur.

Le Dizi fait actuellement un retour aux origines dans son timbre et son intonation, pour redevenir un instrument de musique à part entière. Il se décline en vertu des gammes de notes, comme tout autre instrument de musique contemporain au monde.

Zhou Linsheng nous a confié en plus qu'avant les Dizi étaient enduits d'une sorte de laque appelée « Sheng Qi », en français, laque crue, dont le processus de fabrication est long et compliqué. Mais l'avantage est que ce genre de laque est plus résistant à l'usure du temps.

Maintenant, les Dizi sont recouverts de laque courante. Plus rapide au séchage, mais qui s'effrite au bout d'une dizaine d'années. Zhou Linsheng souligne qu'au fil du temps les techniques ancestrales de peinture avec du Sheng Qi, la laque crue, tend à disparaître faute de successeurs à qui transmettre le savoir.

(Yannine)

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