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Le service du renseignement américain a rendu public, le 4 décembre, un rapport. D'après ce document, Téhéran avait suspendu son programme de recherches nucléaires depuis 2003.
Si l'on s'en tient à ce dernier rapport, rédigé par le service d'Evaluation du renseignement national américain (NIE), l'Iran avait arrêté son programme nucléaire militaire et ne l'avait pas relancé jusqu'ici. Même si depuis il continue d'enrichir l'uranium et peut donc toujours développer une arme nucléaire d'ici à 2015. Et qu'il pourrait même réussir à faire exploser sa première bombe atomique à cette date.
Toujours d'après ce document, des preuves probantes démontrent que le programme d'armements nucléaires iranien a été suspendu à l'automne 2003. A l'époque même où les médiations diplomatiques avec la France, la Grande-Bretagne et l'Allemagne ainsi que les diverses parties concernées étaient parvenues à deux accords. Téhéran s'était alors engagé à cesser toutes activités d'enrichissement d'uranium, avait signé le Protocole additionnel et avait accepté de faciliter le travail des inspecteurs de l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique). La signature de ces deux accords avait rendu extrêmement difficile la fabrication des armées nucléaires par l'Iran.
La publication de ce rapport remettant en question la menace iranienne a eu un vif écho aux Etats-Unis. Certains estiment que ce document a considérablement terni l'image de l'administration Bush, qui continue à clamer haut et fort l'existence d'un danger nucléaire iranien. Des médias américains ont notamment rappelé que, ces dernières années, l'administration Bush n'avait cessé de fustiger l'Iran et qu'elle n'avait pas exclu la possibilité de recourir à la force contre la République islamique. Il y a un peu plus d'un mois, le président George W. Bush avait déjà affirmé qu'il fallait tout faire pour empêcher l'Iran de se procurer des armes nucléaires afin d'éviter une troisième guerre mondiale.
Un conseiller de la politique de défense, travaillant pour Hillary Clinton, candidate démocrate à la présidentielle américaine, a déclaré, sans ambages, que ce rapport était la preuve des derniers méfaits du gouvernement Bush. Un gouvernement qui, selon ses dires, dénature délibérément les informations pour atteindre son objectif idéologique.
Quant aux pays occidentaux, ils déploient toujours de nombreux efforts au sein du Conseil de sécurité de l'ONU pour exercer de plus fortes pressions sur Téhéran et lui imposer des sanctions plus sévères. Face à cette situation, l'opinion publique américaine relève, qu'avec la perte de crédibilité de l'administration Bush et de la diminution de la menace iranienne, ces efforts deviendront plus complexes.
La presse américaine, citant des propos tenus par le président russe, Vladimir Poutine, quelques semaines auparavant, indique que les preuves à l'encontre de l'Iran font défaut pour démontrer que Téhéran se livre actuellement à la fabrication d'armes nucléaires et que les Etats-Unis ont exagéré la menace du dessein iranien. Le rapport d'évaluation du service du renseignement américain confirme les propos du président Poutine. Le ministre iranien des Affaires étrangères, Manouchehr Mottaki, a d'ailleurs fait remarquer, le 4 décembre, que la communauté internationale prenait, de plus en plus, conscience du caractère pacifique des activités nucléaires iraniennes.
De son côté, le conseiller américain des affaires de sécurité d'Etat, Stephen Hadley, a reconnu, lui- aussi, que ce document rendrait certainement plus complexe les résolutions de la communauté internationale renforçant les sanctions prises contre l'Iran. Et a déploré que le contenu de ce rapport offre un prétexte à ceux qui s'opposent aux sanctions.
Bref, ce rapport devrait donc influencer la politique américaine à l'égard de l'Iran. D'ailleurs, selon un journaliste du New York Times, peu de rapports du NIE ont, jusqu'à présent, réussi à infléchir de manière aussi radicale, aussi inattendue et aussi étonnante les débats sur la politique étrangère menée par Washington. Vu la situation actuelle, les raisons émises par l'administration Bush pour déclencher une guerre en Iran ne subsisteront pas au temps.
Après la publication du rapport favorable à Téhéran, les médias ont toutefois pris le parti du président George W. Bush. Au cours d'un point presse, le président américain a maintenu son point de vue sur l'existence d'un danger nucléaire iranien. « L'Iran était dangereux, l'Iran est dangereux et sera dangereux. » Et a réitéré la nécessité de maintenir la pression sur ce pays.
Aujourd'hui, on s'interroge sur les retombées concrètes de ce rapport sur la politique américaine. Quoiqu'il en soit, le recours à la force ou à la menace dans les affaires internationales est peu appréciable. Et le rapport du NIE, en particulier son volet sur la suspension du programme militaire nucléaire iranien, a raffermi cette conviction. |
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