Afghanistan : les Etats-Unis, en position délicate, devront désormais composer avec les talibans
2007-09-11 18:05:05 cri

« Nous sommes disposés à entamer des négociations ». Voilà, en substance, le message qu'a adressé lundi le porte-parole des talibans, Yousouf Ahmadi, au gouvernement afghan. Il répond donc positivement à l'appel de Hamid Karzai, le président afghan, qui proposait la veille d'ouvrir des négociations entre le gouvernement et la rébellion. Une prise de position de la part des talibans qui est tout à fait inédite, puisque c'est la première fois qu'ils acceptent le principe d'une négociation. Une solution de la dernière chance, pour certains observateurs, qui estiment que l'équipe du président afghan n'a plus d'autre choix face à la situation sécuritaire dans le pays, de plus en plus grave.

Une nouvelle approche du gouvernement afghan qui reflète, aussi, la situation difficile des Américains en Afghanistan.

Depuis l'année dernière, la sécurité en Afghanistan s'est brutalement dégradée. Une dégradation qui n'a fait que s'accentuer depuis. Selon les statistiques, depuis 19 mois, plus de 7 000 Afghans ont trouvé la mort lors de ces violences. Jamais depuis la chute du régime des talibans, l'Afghanistan n'avait connu une période aussi critique.

Ce qui est encore plus préoccupant, c'est que les groupes armés ont de plus en plus souvent recours aux enlèvements et aux attentats-suicides pour riposter aux attaques des troupes de la coalition et de l'armée afghane.

Le récent rapport sur la sécurité en Afghanistan, publié par l'Onu, fait état de 103 attentats-suicides entre janvier et août. Un chiffre bien plus élevé que l'an passé, sur la même période.

Ces attentats visaient essentiellement les policiers afghans et les troupes étrangères, mais de nombreux civils ont également péri dans ces attaques.

L'attentat le plus récent a eu lieu pas plus tard que lundi, dans le sud du pays. Bilan : 26 morts et 57 blessés. Une situation pour le moins instable qui a mis un sérieux coup de frein au processus de reconstruction et de développement économique du pays. A l'approche de la rentrée scolaire, quelques 400 écoles ont été obligées de fermer leurs portes par crainte d'attentats.

La situation en Afghanistan s'explique surtout par l'inefficacité de la politique anti-terroriste trop rigide mise en place par les pays occidentaux. Premiers visés : les Etats-Unis. Depuis l'éclatement de la guerre en Afghanistan en 2001, les Etats-Unis et leurs alliés ont axé leurs efforts sur l'extermination des talibans et la traque du chef d'Al-Qaïda, Oussama Ben Laden. Des hommes et du matériel ont été dépêchés sur place. Mais les résultats concrets, sur le terrain, sont minces. Ben Laden est toujours en fuite. Les talibans ont littéralement résucités de leurs cendres, et la situation sécuritaire en Afghanistan se dégrade.

Et pourtant, actuellement, quelques 27 000 militaires de l'Otan et une armée de coalition dirigée par les Etats-Unis, forte d'un effectif de 13 000 soldats, sont déployés en Afghanistan. Sans compter que depuis l'année dernière, les troupes étrangères et l'armée gouvernementale afghane ont lancé des offensives militaires de grande envergure contre les talibans. Des actions qui ont permis de frapper les talibans, mais aussi, qui ont touché de nombreux civils innocents, d'où une résistance de plus en plus forte de la population afghane. Bref, les offensives militaires n'ont pas vraiment porté leurs fruits, d'autant plus que ces régions n'ont pas, après coup, été suffisamment contrôlées par le gouvernement après les combats. Et en parallèle, compte tenu de la pression de l'opinion publique dans le monde, certains des pays influents de l'Otan n'ont pas voulu envoyer de troupes dans les régions à haut risque du Sud et de l'Est de l'Afghanistan pour livrer des combats directs contre les forces rebelles.

Pour certains observateurs, les Etats-Unis et leurs alliées occidentaux ont trop confiance en la force militaire. Une force nécessaire, certes, mais insuffisante pour régler le problème afghan. Mais les positions évoluent. Le mois dernier, le sous-secrétaire du département d'Etat américain, Richard Bocher, rencontrait Aftab Ahmad Khan Sheroap, le ministre pakistanais de l'Intérieur. Un entretien à l'issue duquel le représentant américain laissait entendre que Washington ne s'opposait plus à la participation des talibans au processus de paix. Un signe pour certains médias que les Américains sont en difficulté, et qu'ils devront très rapidement modifier leur stratégie.

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