Bras de fer entre le Congrès américain et la Maison blanche sur la guerre en Irak
2007-04-26 19:31:49 cri
Une nouvelle étape est franchie dans le bras de fer auquel se livrent aux Etats-Unis le parlement démocrate et la Maison blanche. La Chambre des représentants du Congrès américain a en effet adopté mercredi soir, le 25 avril, un projet de financement de la guerre en Irak fixant au 31 mars 2008 l'objectif de retrait de la majeure partie des troupes américaines présentes dans le pays. Au total ce sont 218 députés qui ont voté ce texte, contre 208 voix contre. Un texte qui prévoit d'octroyer 124 milliards de dollars de fonds d'urgence pour les frais militaires à l'administration Bush, mais qui, par la même occasion, impose en quelques sorte un calendrier de retrait au gouvernement en lui demandant de commencer à retirer ses troupes d'Irak au plus tard à l'automne prochain. Or, à la Maison blanche, le président Bush a déclaré à plusieurs reprises qu'il apposerait son veto sur toute loi de financement intégrant un calendrier de retrait des troupes. Et même si le texte adopté mercredi ne se veut pas ouvertement contraignant dans les échéances, contrairement à une version antérieure plus musclée, la presse américaine souligne dans son ensemble que l'opposition entre l'organe législatif et le centre exécutif du pouvoir à Washington se creuse désormais franchement sur la question de la guerre en Irak. Dans chaque camp, on joue maintenant cartes sur table.

Cette proposition de loi de financement porte donc sur le déblocage de 124 milliards de dollars de fonds d'urgence, destinés à financer la guerre en Irak et, dans une moindre mesure, en Afghanistan. Mais, le texte exige en même temps que le retrait des troupes commence le premier octobre de cette année, voire même le premier juillet 2007 si le Pentagone ne peut pas attester des progrès du gouvernement irakien dans le domaine du désarmement, du contrôle des violences entre factions religieuses et de l'élimination des combats entre groupes politiques. Pour ce qui est du retrait total des troupes, prévu selon le texte avant le premier avril 2008, l'objectif n'est pas contraignant, et autorise le maintien de forces pour certaines missions non liées aux combats sur le terrain, comme la lutte contre des réseaux terroristes ou l'entraînement des forces irakiennes.

Avec cette proposition de loi à double tranchant, le Parlement met dans une certaine mesure George W. Bush dos au mur. Mais le président américain a pour le coup anticipé, puisque lors d'une conférence de presse tenue le 24 avril, soit la veille du vote à la Chambre des représentants, il a vivement critiqué le Parti démocrate pour son obstination à demander un retrait des troupes d'Irak. Et réaffirmé son opposition farouche à l'éventualité de la fixation d'un quelconque calendrier de retrait. Selon George W. Bush, la sécurité nationale des Etats-Unis dépend directement du résultat des combats sur le front irakien, et un retrait militaire en toute hâte n'apportera ni la paix dans la région ni plus de sécurité pour la population américaine. D'ailleurs, pour lui, cette proposition de loi n'est autre qu'une « déclaration politique » qui ignore les besoins réels des troupes états-uniennes stationnées en Irak.

Nancy Pelosi, la présidente démocrate de la Chambre des représentants a répondu aux propos du président en soulignant que pour la première fois, il est obligé de prendre la responsabilité de la guerre et qu'il refuse de reconnaître cette réalité. Du côté du Sénat, son président Harry Reid, lui aussi démocrate, s'est félicité du vote de ce texte, en le qualifiant de favorable tant aux troupes américaines qu'au pays. Et redoute que le veto présidentiel ne soit aveugle.

En tout cas, pour la presse américaine, une chose est sûre. Quelle que soit l'issue de la guerre en Irak, elle sera bien le plus grand héritage politique du président Bush. En demandant ce retrait, les Démocrates voient donc une occasion de répondre à la volonté populaire, ce qui peut être un enjeu majeur pour battre les Républicains aux présidentielles de 2008.

Bien que majoritaires dans les deux chambres, les démocrates n'ont pas suffisamment de voix pour contrer un éventuel veto de George Bush. Le cas échéant, ils devront voter une nouvelle loi de financement, et le Pentagone sera à court de crédit de guerre en juin ou juillet. De sorte que le président ne fera sans doute aucune concession sur la question de la loi de financement. Mais les Démocrates surfent sur la vague de leur large victoire aux dernières législatives, due notamment à leur alignement sur une opinion publique de plus en plus hostile à la poursuite de la guerre en Irak. En position de force, ils ne feront sans doute pas non plus de concession. Comme l'a d'ailleurs rappelé un parlementaire démocrate, cette proposition de loi de financement sera remise sur le bureau du président Bush malgré ses menaces de veto. Pour sortir de l'impasse, le Parti démocrate devrait réfléchir aux moyens de rallier certains parlementaires républicains à leur point de vue.

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