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Les choses se précisent doucement entre Bruxelles et Téhéran. Les pourparlers entre Ali Larijani, secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale de l'Iran, par ailleurs en charge du dossier nucléaire, et Javier Solana, le haut représentant de l'UE pour la politique étrangère et de sécurité, doivent commencer mercredi à Ankara, en Turquie. L'objectif, faire avancer le règlement du problème nucléaire iranien. Ce sera la première rencontre entre les deux hommes depuis l'adoption de la deuxième résolution du Conseil de Sécurité des Nations-Unies imposant des sanctions à l'Iran.
Le Conseil de Sécurité a demandé à maintes reprises à l'Iran de cesser ses activités d'enrichissement d'uranium. Un nouveau délai a ainsi été fixé, au-delà duquel, si l'Iran ne cesse pas ces activités, le Conseil de Sécurité prendra des mesures plus sévères contre l'Iran. Et le 25 avril, soit mercredi, c'est justement le 30ème jour de ce délai, d'un total de 60 jours. Ce qui explique pourquoi la communauté internationale, dans son ensemble, attend beaucoup des prochaines négociations.
Pour cela, il aura fallu passer outre une divergence qui séparait l'UE et l'Iran, à savoir la façon dont sont interprétées les activités d'enrichissement d'uranium. L'UE exigeait leur interruption comme acte fondateur en vue des négociations, tandis que l'Iran rejetait cette demande en réclamant son droit à l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire. Lors de la conférence des ministres des Affaires étrangères de l'UE, qui s'est tenue le 23 avril à Luxembourg, Javier Solana a fait savoir que durant les prochaines négociations, ce problème serait mis de côté par les Européens, en échange de quoi l'Iran avancerait une série de mesures visant à promouvoir la coopération nucléaire civile avec les pays de l'Union.
Mais pour Téhéran, il s'est aussi agit de se préparer pour rester en position de force. Le 9 avril, l'Iran déclarait ainsi avoir accédé au stade de la production de combustible nucléaire industriel. Un pas décrit comme décisif, notamment par le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Seyed Mohammad-Ali Hosseini, qui a annoncé le 22 avril, lors d'un point presse, que ce nouvel élément devait être pris en considération durant le prochain cycle de négociation sur la question.
Le lendemain, Ali Larijani a dit en des termes explicites que ces nouvelles circonstances appellent un nouveau type de résolution, et que les questions sur lesquelles on a achoppé dans le passé doivent être mises de côté dans les prochains pourparlers. Il a aussi plaidé pour le respect par l'UE d'une « attitude stricte », qui ouvrirait la voie à une solution. Une « attitude stricte », voilà une expression pour le moins ambiguë? Disons, en suivant certains analystes, qu'il faut voir par là la reconnaissance par l'UE des succès obtenus par l'Iran dans l'exploitation civile de l'énergie nucléaire.
Le même jour, toujours le 23, le ministère iranien des Affaires étrangères a répondu à Javier Solana en promettant une progression des négociations bilatérales? Saluant par la même l'engagement de l'Europe contre l'éventualité d'un recours à la force pour obliger l'Iran à abandonner son programme nucléaire.
Lors d'une interview exclusive qu'il a accordée lundi à la télévision espagnole, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a annoncé que l'Iran continuerait à honorer le Traité de non-prolifération nucléaire, tout en fustigeant les sanctions de l'ONU. C'est là le paradoxe de la position iranienne : donner des gages en respectant le traité, mais, en même temps, « défendre ses droits nationaux », pour reprendre les termes du président iranien, qui a plaidé pour une poursuite des négociations dans le but de détendre la crise et dépolitiser le débat. Et Mahmoud Ahmadinejad de conclure en appelant l'UE à adopter une position indépendante de celle des Etats-Unis.
L'espoir de voir la crise se résoudre sera donc réel, à partir de mercredi à Ankara. Même si, de l'aveu même de Javier Solana, on ne saurait garantir ni le succès, ni l'échec, de sa rencontre avec Ari Larijani. D'autant que, si l'UE semble avoir mis de l'eau dans son vin en écartant la question de l'enrichissement d'uranium, la conférence des ministres des Affaires étrangères s'est également prononcée, en cas de non-coopération de Téhéran, pour des sanctions plus sévères que celles de l'ONU. Et côté iranien, ses récentes « réalisations nucléaires » sont censées apparaître comme un nouvel enjeu de ces négociations. Or, les pays occidentaux estiment dans leur ensemble que ces prétendues « réalisations nucléaires » de l'Iran sont exagérées. Difficile, dans ces circonstances, de savoir si les prochaines négociations peuvent vraiment aboutir à des progrès substantiels. |
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