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En Irak, la faction dirigée par l'imam radical chiite Muqtada al-Sadr a officialisé lundi, le 16 avril, son retrait du gouvernement de Bagdad. Il s'agit pour le mouvement de protester contre les propos du Premier ministre Nuri al-Maliki, lequel a écarté la question d'un calendrier du retrait des troupes états-uniennes en Irak et ordonné l'arrestation d'éléments appartenant à l'armée du Mahdi, le bras militaire de la faction de Sadr.
Confirmation de ce retrait le même jour, lorsque le responsable de la faction de Muqtada al-Sadr au parlement, Nassar al-Rubaie a lu devant la presse une déclaration selon laquelle les six ministres du mouvement se retirent du gouvernement d'union nationale pour laisser leur place à des personnalités indépendantes susceptibles de représenter la volonté du peuple.
Le Premier ministre irakien Nuri al-Maliki, tout en accueillant favorablement cette décision, a laissé entendre que les six portefeuilles seront assumés par des personnalités compétentes et éloignées des disputes entre communautés religieuses. Dans une déclaration qu'il a publié lundi, il a d'ailleurs enfoncé le clou en soulignant que la répartition des portefeuilles ministériels en fonction de l'appartenance à des factions religieuses n'aide pas l'Irak à surmonter ses difficultés ? ce pourquoi il faut selon lui que toutes les forces politiques irakiennes s'unissent et conjuguent leurs efforts vers ce but commun. Nuri al-Maliki a par ailleurs répété son refus de planifier le calendrier d'un retrait des troupes américaines car, selon lui, « la question du départ des troupes de la coalition en Irak est directement liée à la capacité des forces armées irakiennes d'assurer entièrement le contrôle et la sécurité des différentes provinces irakiennes. »
Reste que pour beaucoup d'analystes, l'actuel gouvernement d'union nationale irakien, composé de 37 membres, se trouve face à un réel défi avec le retrait des six ministres sadristes. Une retrait qui, sans menacer le gouvernement d'effondrement, provoque un violent choc dans la vie politique irakienne.
Car en Irak, l'urgence est naturellement à la reprise de l'activité économique, mais surtout à la garantie d'un niveau satisfaisant de sécurité. Or, l'insistance de la faction de Muqtada al-Sadr sur la question d'un calendrier du retrait des troupes américaines, problème très sensible, et cette volonté de vouloir quitter le gouvernement, peuvent se traduire par une levée de bouclier de l'organisation chiite radicale. Et par un regain de violences de la part de ses membres les plus actifs, violences qui peuvent toujours déraper. Depuis le début des opérations de frappe codées que les troupes de la coalition emmenée par les Etats-Unis ont mené avec l'armée irakienne sous le nom d'opération « Law and order » (« la loi et l'ordre »), Mustada al-Sadr avait appelé un temps ses partisans à mettre un bémol à leurs attaques. Or, la vieille du retrait officiel de son mouvement, le dimanche 15, la presse locale a annoncé la découverte à Bagdad de 30 cadavres, fusillés et laissés à l'abandon. Leurs corps révèlent des traces de sévices et d'une liquidation à bout portant. Cette journée noire est celle durant laquelle on a enregistré le plus de civils mis à mort. Un autre signe, parmi tant d'autres, de la recrudescence des actes de violence terroriste.
La communauté chiite, qui constitue une large majorité au sein de la population irakienne, est aujourd'hui très influente dans le pays. Nul doute que la prestige politique du Premier ministre Maliki sera affadi par la perte du soutien de Moqtada al-Sadr, dont la faction était son plus important soutien. Sur les 275 sièges du Parlement national irakien, 32 sont détenus par la faction sadriste, soit le plus grand bloc de la coalition. De sorte que le mouvement radical chiite est en parfaite mesure de faire pression en faveur de l'adoption d'un calendrier du retrait des troupes américaines. Confirmation avec le responsable du groupe, Nassar al-Rubaie, qui a laissé entendre que « la fixation du plan de retrait des troupes américaines sera achevée au Parlement. » Une chose est sûre, cette question du retrait est toujours aussi sensible en Irak. Il y a une semaine, déjà, Muqtada al-Sadr avait mobilisé des dizaines de milliers d'Irakiens qui ont manifesté à Nadjaf et Kerbala, les deux villes saintes du chiisme, pour appeler à l'établissement de ce fameux calendrier du retrait. Autant dire que si Nuri al-Maliki se contente de se cacher derrière l'administration Bush sans enregistrer de résultat effectif en terme de reprise économique et de garantie de la sécurité, son isolement politique va aller grandissant. |
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